« Donner un sens à l’intelligence artificielle », c’est le titre du rapport du député Cédric Villani, présenté en mars 2018 pour souligner le caractère stratégique de l’Intelligence Artificielle en santé. C’est dans ce rapport que la place prioritaire de la santé pour le développement de l’IA était soulevée pour la première fois, place remise en avant lors de la présentation du volet numérique du Plan de Transformation du système de santé, « Ma Santé 2022 ». Le Comité Consultatif National d’Ethique (CCNE) précise également que « les effets de la mutation numérique majeure pour les métiers du champ sanitaire et médico-social doivent faire l’objet d’une mobilisation forte et attentive avec la création de mécanismes nouveaux de suivi et d’anticipation »

Les applications de l’IA en santé sont multiples, et les opportunités que l’IA présente sont très prometteuses pour l’avenir du monde médical. Les initiatives prises récemment au travers de ces différents communiqués en France, ont pour objectif d’ouvrir de plus en plus l’Intelligence Artificielle au secteur de la santé et visent notamment à piloter de manière effective les données de santé publique.

Mais avant tout, quels sont les impacts de l’IA sur le secteur de la santé ? Quels sont les risques de son intégration dans un secteur aussi important ? Quelles sont les perspectives d’avenir ?

Intelligence Artificielle : petit rappel

Née dans les années 1950 avec l’objectif de faire produire des tâches humaines à des machines mimant l’activité du cerveau, l’Intelligence Artificielle est aujourd’hui massivement utilisée pour concevoir des machines capables d’aider les humains dans leurs tâches.

L’IA est en plein essor et en perpétuelle évolution. De nombreuses voies de recherches sont alors explorées pour améliorer au maximum les performances techniques de ces systèmes, mais aussi leur adéquation aux pratiques médicales visées. Les voies de recherche portent notamment sur le traitement des données, leur structuration et leur anonymisation.

Dans le domaine médical, l’Intelligence Artificielle est l’utilisation d’algorithmes et de logiciels pour s’approcher au plus près de la cognition humaine dans l’analyse de données médicales complexes. Cela découle sur la capacité de ces algorithmes informatiques à tirer des conclusions sans intervention humaine directe.

L’Intelligence Artificielle au service de la santé

Aide au diagnostic, chirurgie robotique, réalité virtuelle, tests génétiques : les applications techniques de l’IA en santé sont multiples ; que ce soit pour l’accompagnement du patient, le suivi médical, la collaboration avec les professionnels de santé ou encore l’aide aux fonctions supports.

Le secteur de la santé dans son ensemble contient des métiers administratifs et techniques, dits « fonctions support », l’impact de l’IA sur ces métiers est élevé. Il est estimé qu’entre 40 000 et 80 000 emplois de ces fonctions pourraient faire l’objet d’une automatisation de certaines de leurs activités grâce aux effets du développement de l’Intelligence Artificielle dans le secteur de la santé. C’est dans l’étude de l’Institut Montaigne « IA et emploi en santé : quoi de neuf docteur ? » qu’il est d’ailleurs précisé que l’IA se déploiera d’abord sur les fonctions supports et non sur les fonctions non médicales ou soignantes.

Ce même rapport précise un court panorama des domaines d’application actuels de l’IA en santé :

  • La reconnaissance automatique de la parole: l’IA permet de remplir automatiquement des fiches médicales selon les dires d’un patient ou d’un médecin. Cela découle bien évidemment sur un gain de temps certain.
  • La génération automatique de textes, utile pour la mise à jour autonome d’un dossier médical. L’objectif ? Un suivi du patient en temps réel.
  • Les chatbots. Utilisés dans de nombreux secteurs, ils permettent de mener un interrogatoire virtuel à un patient, et donc de libérer du temps à la personne qui était en charge de le faire.
  • L’aide à la décision: au-delà de rassembler et de partager les prescriptions, l’IA apporte une aide au médecin pour les formuler. Elle permet notamment de croiser certains paramètres pour définir la posologie la plus adaptée.
  • L’apprentissage profond: nourrie de bases de données énormes, l’IA est capable d’intervenir dans l’interprétation et la définition de diagnostics, basés sur des cas passés. Par exemple, dans le cadre du dépistage du cancer du sein, elle peut reconnaître seule des cellules cancéreuses.
  • La reconnaissance biométrique, pour faciliter l’accès aux dossiers de santé électroniques, en garantissant une protection totale des données.

Efficience, automatisation, supervision… Nombreux sont les avantages des leviers numériques déjà déployés dans le secteur de la santé.

L’intelligence artificielle en santé : quels risques ?

Malgré tous les avantages recensés pour l’intégration de l’Intelligence Artificielle dans le secteur de la santé, il semblerait qu’une certaine réticence soit observée par le Grand Public. En effet, faire intervenir des processus « robotisés » sur des sujets aussi importants que ceux de la santé peut paraître effrayant au premier abord. L’IA comporte certains risques, mais nous restons tout de même très loin des films de science fiction dans lesquels des robots tueurs viendraient se rebeller contre l’humanité…

L’atteinte à la vie privée et la violation du secret professionnel lors de l’exploitation des données personnelles fait partie de l’un des risques majeurs. Même si la CNIL reste ferme quant à la protection des données, des demandes sont faites par les acteurs principaux de l’IA pour assouplir les règles en la matière et éviter de freiner certains usages de cette technologie.

L’automatisation des tâches est l’un des avantages principaux de l’IA pour les fonctions support. S’il donne plus de temps aux employés pour réaliser des tâches à plus forte valeur ajoutée, le risque est d’aller jusqu’à la suppression de certains emplois, qui pourraient être remplacés par l’IA. Ce risque semble tout de même infondé puisque l’humain parait irremplaçable dans le secteur de la santé.

L’erreur de la machine demeure être le risque qui effraie le plus les principaux intéressés. Qu’en serait-il de la responsabilité judiciaire dans le cas d’un tel accident ? Ce risque est étroitement lié avec la peur de l’opacité des algorithmes. Car même si l’IA permet l’apprentissage profond d’une machine et la déduction de diagnostics sur base de cas déjà vécus, elle manquera toujours de « bon sens humain » et c’est une des raisons pour lesquelles l’intervention humaine sera probablement toujours nécessaire dans le secteur de la santé.

Qu’en est-il de l’éthique et de la Loi ?

L’IA a de nombreuses promesses à apporter au secteur de la santé, mais elle est aussi l’objet de nombreuses inquiétudes, comme expliqué dans le paragraphe précédent. La perte du libre arbitrage face à une technologie susceptible de prendre une décision non adaptée au patient nécessite de la compréhension par le soignant pour appréhender le fonctionnement de cet algorithme. Au-delà d’un simple moyen de se rassurer, il s’agit d’une obligation déontologique : le médecin doit pouvoir expliquer à son patient le raisonnement d’un diagnostic. C’est là qu’est toute l’importance de la relation humaine dans la santé.

En effet, lorsque la robotique est amenée à jouer un rôle social auprès des patients, l’intégration de la notion d’éthique dans l’IA est nécessaire. Comme le précise le livre blanc du Conseil National de l’Ordre des Médecins (CNOM) « Médecins et patients dans le monde des data, des algorithmes et de l’Intelligence Artificielle », « dans ce tourbillon technologique en marche accélérée, nous devons nous proposer […] de réussir à organiser et assurer la complémentarité entre l’homme et la machine, le premier conservant la capacité éthique de garder toujours le dernier mot ».

L’éthique semble alors être le compromis acceptable entre les partisans d’une intégration totale de l’IA dans le secteur de la santé et ceux qui s’inquiètent des éventuels risques liés à cette intégration.

Pour satisfaire chaque partie, établir un cadre de régulation et adopter des réglementations spécifiques semble alors nécessaire. La prise en compte d’un encadrement plus souple, tel que le soft law, est envisageable. Il s’agit d’un système de droit plus souple, permettant de réguler le sujet de manière beaucoup moins rigide et lourde qu’un encadrement classique. Cela permet de réguler le domaine sans qu’il soit trop freiné par certaines contraintes.

Entre amélioration des fonctions de santé et non-respect de l’éthique de ce secteur particulier, il n’y a qu’un pas. L’évolution est en marche et l’intégration de l’Intelligence Artificielle en santé offre de belles perspectives. Les établissements se doivent de s’accompagner de solutions performantes et d’intégrer l’information et la conduite au changement auprès des équipes concernées pour faire de cette intégration une véritable réussite.

Sources :

Macs ; Sanofi ; Inserm ; Wikipedia

Rédigé par Pauline Monier, chargée de marketing et communication

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