Un acheteur dispose de nombreux moyens d’action et de sanction sur le titulaire d’un marché public et parmi ceux-ci, le plus répandu et utilisé est ce qu’on appelle : les pénalités.

Si ces pénalités permettent de sanctionner un défaut dans l’exécution d’un marché public, son application reste à l’appréciation du pouvoir adjudicateur.

Comment faire de ces pénalités : un véritable outil pour gérer les contrats de la commande publique ? Quelles en sont les obligations légales ? Existe-t-il un mode opératoire ? Nous vous proposons un aperçu complet à travers cet article.

Pénalités, un outil pour garantir le respect des stipulations du contrat public

Qui dit infraction à une loi ou un règlement dit pénalité. Vous l’aurez compris, les pénalités jouent un rôle dans le respect par le cocontractant des stipulations contractuelles indiquées au sein du marché public. Cela signifie donc que si le titulaire ne respecte pas une obligation, cela peut donner lieu à l’application de pénalités.

Les pénalités sont prévues aux CCAG mais bien souvent, le pouvoir adjudicateur précise celles-ci au sein de son CCAP pour plus de sécurité.

Précisons toutefois que le principe est que le pouvoir adjudicateur a la possibilité d’appliquer des pénalités mais il ne s’agit pas d’une obligation.

En revanche, il faut garder à l’esprit que ces pénalités qui auraient pu être appliquées sont de l’argent public et donc l’argent des citoyens. Cet argent aurait pu être économisé et la collectivité/ l’organisme public doit donc rendre des comptes. Il est donc de son devoir d’expliciter la non-application d’une pénalité par un acte soit unilatéral (décision de l’acheteur) ou soit via un acte signé par les deux parties.

Les pénalités dans les marchés publics : mode opératoire 

1. Obligation d’indiquer les pénalités dans les clauses du marché

Les pénalités sont considérées comme une sanction contractuelle. L’acheteur est donc dans l’obligation d’indiquer les pénalités prévues dans les clauses de son marché.

L’acheteur doit donc particulièrement faire attention à la rédaction des clauses relatives aux modalités de calcul des pénalités et aux délais d’exécution.

Par exemple, si l’acheteur indique que la non-participation à des réunions engendre une pénalité mais n’indique pas par exemple que le chef de projet doit être présent physiquement. Cela signifie donc que si une autre personne représente la société à cette réunion, la pénalité ne peut avoir lieu.

Pour faciliter le travail des acheteurs publics, la procédure liée à ces pénalités administratives est déjà transcrite dans un document officiel en fonction du manquement de l’opérateur économique en charge d’une commande ou d’un lot donné. Il s’agit des CCAG.

En effet, Les CCAG prévoient des clauses-type de pénalités que l’acheteur est libre d’aménager.

2. Tout savoir sur les modalités d’application des pénalités de retard dans un marché public

Découvrez les modalités d’application sous forme de questions/réponses :

A qui les pénalités sont applicables ?

L’acheteur appliquera la pénalité au titulaire du marché ou à l’un de ses sous-traitants après avoir dûment constaté le non-respect de la règle. Si par exemple, la pénalité est liée à un retard de livraison du produit, il est important de démontrer un décompte précis du nombre du jours de retard en prenant en compte les prolongations de délais accordées et des retards dû par exemple à des jours d’intempéries.

Il faut donc prouver que le retard est bien dû à cause de l’opérateur économique et non à cause d’un autre fournisseur présent sur le chantier ou encore à des jours d’intempéries, etc.

La mise en demeure du titulaire est-elle obligatoire ?

En cas de non stipulation dans les documents particuliers du marché, l’application de ces pénalités s’effectue de plein droit et donc sans mise en demeure. Les clauses de pénalités de retard au sein du CCAG dispensent également l’acheteur de procéder à une mise en demeure préalable. Il est donc vivement conseillé à l’acheteur d’indiquer explicitement s’il y a une mise en demeure prévue en cas de non-respect de certaines règles.

Par ailleurs, les  pénalités sont fréquemment prévues par l’acheteur pour sanctionner le non-respect des délais d’exécution des prestations par le titulaire du marché. Elles peuvent néanmoins être prévues pour sanctionner la méconnaissance d’autres obligations contractuelles (absence aux réunions de chantier, non remise d’un document prévu au marché, indisponibilité de matériels, violation de clauses environnementales, etc.)

Quand les pénalités peuvent être appliquées ?

Tout dépend des stipulations contractuelles indiquées.

En effet, si vous souhaitez appliquer la pénalité sur les acomptes versés (par exemple, mensuellement) au titulaire du marché, il faut que le prévoir dans les clauses préalables du marché. Si cela n’a pas été prévu, les pénalités ne constitueront qu’un élément du décompte général du marché.

Cependant, pour les marchés de travaux, si le marché ne déroge pas à l’article 13.2 du CCAG-Travaux, les pénalités de retard sont incluses dans l’état d’acompte mensuel.

Comment calculer les pénalités ?

Les CCAG prévoient les modalités d’application et de calcul des pénalités de retard.

Par ailleurs, les CCAG Travaux, MI et PI prévoient une exonération des pénalités lorsque leur montant ne dépasse pas 1.000€ HT. En ce qui concerne les CCAG -FCS et TIC, l’exonération est fixé dès 300€ HT. Les articles 14 des CCAG FCS et TIC prévoient également les modalités d’application et de calcul de pénalités applicables en cas d’indisponibilité de matériel faisant l’objet du contrat;

Quels outils sont à disposition pour appliquer les pénalités ?

Comme explicité auparavant, il existe des clauses de pénalités prérédigées au sein des CCAG. La direction des Affaires Juridiques met également à disposition le formulaire EXE13 qui est un modèle que le pouvoir adjudicataire ou l’entité adjudicateur peut utiliser pour faire constater un retard dans l’exécution des prestations et donc calculer les pénalités et notifier le titulaire du marché du montant de ces pénalités de retard.

Si vous choisissez de dématérialiser votre gestion des marchés publics, certains logiciels, tels que LiaWeb, prévoient également ces modèles au sein de leur solution et le calcul en automatique des pénalités

Existe-t-il d’autres outils que les pénalités ?

Les pénalités ne sont pas le seul mécanisme de sanction. Ainsi, lorsque le montant des pénalités atteint un montant excessif, l’acheteur doit s’interroger sur la possibilité de poursuivre le marché et faire usage, si l’exécution du contrat dans des conditions acceptables n’apparaît plus possible, d’autres outils prévus par le droit de la commande publique : mise en régie ou résiliation pour faute, le cas échéant, aux frais et risques du titulaire.

Existe-t-il des exceptions ?

En principe, le titulaire d’un marché encourt, sans mise en demeure préalable, des pénalités de retard fixées par le contrat au cas où le délai d’exécution n’est pas respecté. Cependant, en cas de  force majeure, l’acheteur peut ne pas appliquer les pénalités de retard sur demande du titulaire.

Aujourd’hui, la crise Covid-19 : un exemple de cas de force majeure

Le cas de force majeur fait partie des exceptions dans l’application des pénalités de retard. En effet, un acheteur ne peut pas appliquer son droit de pénalité si le titulaire du marché en fait la demande.

Au regard de l’épidémie exceptionnelle de Coronavirus affectant notamment la France, la question de l’exonération des pénalités a donc été soulevée par le ministre de l’Economie.

Pour rappel, le force majeur se caractérise par la survenance d’un évènement imprévisible, irrésistible et extérieur, qui empêche l’entreprise d’exécuter son obligation. Il s’agit donc d’un évènement dont l’entreprise n’est donc pas à l’origine ou encore qu’il ne pouvait pas prévoir lors de la conclusion du contrat.

En conséquence, pour tous les marchés publics d’Etat ou des collectivités locales, les entreprises dans l’impossibilité d’honorer leurs obligations ne se verront pas appliquer de pénalités de retard.

Pour ce faire, l’entreprise, titulaire du contrat, devra démontrer qu’il n’est pas en capacité de respecter le délai d’exécution préalable prévu.

Outre ces mesures pour faire faire aux sanctions de retard, le gouvernement a également prévu d’autres mesures dans le cadre de la gestion de la commande publique afin de soutenir les entreprises. Ces mesures ont été énoncées dans l’ordonnance n°2020-319 du 25 mars 2020 et dont la DAJ a effectué une fiche technique.

Les clauses de pénalités, une interprétation extensive pouvant mener à des contestations

L’application de ces pénalités est un droit contractuel de l’administration publique.  Cependant, leur interprétation est loin d’être un exercice évident et cela peut mener à d’interminables contestations.

En effet, si, par exemple, la pénalité de retard prévue déroge au CCAG (Cahier des clauses administratives générales) par une formule dissuadant les perspectives malheureuses d’un retard d’exécution ou de livraison. A défaut de mention dans le dernier article du CCAP, la pénalité prévue … est nulle et non avenue.

D’autre part, si le montant des pénalités applicables est disproportionné au regard des désordres subis par la personne publique quand bien même elles étaient prévues au contrat, signé des parties : dès lors, à supposer que leur montant soit conséquent (et dépasse le montant de l’acte contractuel comme le bon de commande voire le marché – la chose n’est pas rare, également), le titulaire peut désormais saisir le juge administratif (jusqu’au Conseil d’Etat) qui peut les moduler à la baisse … mais aussi à la hausse lorsque, par effet balancier, leur montant paraît dérisoire en comparaison du préjudice.

En conclusion, les pénalités de retard doivent faire l’objet d’un soin particulier dès la passation du contrat afin d’éviter tout ambiguïté dans l’interprétation des termes et des clauses. Les pénalités de retard pour toutes phrases ou délais doivent être donc indiquer dans le contrat.

Par ailleurs, nous vous conseillons de maintenir un dialogue de proximité avec vos prestataires de contrat et surtout pendant l’exécution de votre contrat afin de ne pas avoir à effectuer ces demandes de pénalités.

Le maitre mot est : « les paroles s’envolent, les écrits restent ».

Pour vous aider dans la rédaction des clauses de votre marché public ainsi que dans l’exécution de vos marchés et donc également dans la prise en compte des pénalités de retard, Ordiges a développé LiaWeb, le logiciel du marché qui vous permet de gérer facilement et simplement chaque étape de vos processus marchés publics.

Rédigé par Charlotte Lambert – Marketing & Communication Officer

Sources : LegiFrance, DAJ, Economie.gouv.fr

 

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